Aristote, Les parties des animaux.
Mais, ayant déjà traité de ce grand sujet et
ayant exposé ce que nous en pensons, il ne nous reste plus ici qu'à parler de la nature
animée, en ne négligeant, autant qu'il dépendra de nous, aucun détail, quelque bas ou
quelque relevé qu'il soit. C'est qu'en effet, même dans ceux de ces détails qui peuvent ne pas
flatter nos sens, la nature a si bien organisé les êtres qu'elle nous
procure, à les contempler, d'inexprimables jouissances, pour peu qu'on
sache remonter aux causes et qu'on soit réellement philosophe.
Quelle contradiction et quelle folie ne serait-ce donc pas de se complaire à regarder de simples
copies de ces êtres, en admirant l'art ingénieux qui les produit,
en peinture ou en sculpture, et de ne point se passionner encore plus vivement
pour la réalité de ces êtres que crée la nature, et dont il
nous est donné de pouvoir comprendre le but !
Aussi, ce serait une
vraie puérilité que de reculer devant
l'étude
des êtres
les plus infimes. Car dans toutes les œuvres de la nature, il y a toujours place pour l'admiration, et
l'on peut leur appliquer à toutes sans exception le mot qu'on prête à Heraclite, répondant aux étrangers qui étaient venus pour le
voir et s'entretenir avec lui. Comme en l'abordant, ils le trouvèrent qui se chauffait au
feu de la cuisine : « Entrez sans crainte, entrez toujours, » leur dit le philosophe,
«
les Dieux sont ici comme partout. » De même, dans l'étude des animaux, quels qu'ils soient, nous ne devons jamais détourner nos regards dédaigneux, parce que,
dans tous indistinctement, il y a quelque chose de la puissance de la nature et
de sa beauté.
Il n'y a jamais de hasard dans les œuvres qu'elle nous présente. Toujours ces œuvres ont en vue une certaine fin ; et il n'y a rien au monde où le caractère de cause finale éclate plus éminemment qu'en elles.
Or la fin en vue de laquelle une chose subsiste ou se produit, est précisément ce qui constitue
pour cette chose sa beauté et sa perfection.
Que si quelqu'un était porté à mépriser comme au-dessous de lui
l'étude des autres animaux,
qu'il sache que ce serait aussi se mépriser soi-même; car ce n'est pas sans la plus grande répugnance qu'on parvient à connaître l'organisation de
l'homme, sang, chairs, os, veines et tant d'autres parties du genre de celles-là.
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