mardi 8 janvier 2013

Cours du 8 janvier : Aristote, les dieux sont dans la cuisine


Aristote, Les parties des animaux.
Mais, ayant déjà traité de ce grand sujet et ayant exposé ce que nous en pensons, il ne nous reste plus ici qu'à parler de la nature animée, en ne négligeant, autant qu'il dépendra de nous, aucun détail, quelque bas ou quelque relevé qu'il soit. C'est qu'en effet, même dans ceux de ces détails qui peuvent ne pas flatter nos sens, la nature a si bien organisé les êtres qu'elle nous procure, à les contempler, d'inexprimables jouissances, pour peu qu'on sache remonter aux causes et qu'on soit réellement philosophe. Quelle contradiction et quelle folie ne serait-ce donc pas de se complaire à regarder de simples copies de ces êtres, en admirant l'art ingénieux qui les produit, en peinture ou en sculpture, et de ne point se passionner encore plus vivement pour la réalité de ces êtres que crée la nature, et dont il nous est donné de pouvoir comprendre le but !
Aussi, ce serait une vraie puérilité que de reculer devant l'étude des êtres les plus infimes. Car dans toutes les œuvres de la nature, il y a toujours place pour l'admiration, et l'on peut leur appliquer à toutes sans exception le mot qu'on prête à Heraclite, répondant aux étrangers qui étaient venus pour le voir et s'entretenir avec lui. Comme en l'abordant, ils le trouvèrent qui se chauffait au feu de la cuisine : « Entrez sans crainte, entrez toujours, » leur dit le philosophe, « les Dieux sont ici comme partout. » De même, dans l'étude des animaux, quels qu'ils soient, nous ne devons jamais détourner nos regards dédaigneux, parce que, dans tous indistinctement, il y a quelque chose de la puissance de la nature et de sa beauté. Il n'y a jamais de hasard dans les œuvres qu'elle nous présente. Toujours ces œuvres ont en vue une certaine fin ; et il n'y a rien au monde où le caractère de cause finale éclate plus éminemment qu'en elles. Or la fin en vue de laquelle une chose subsiste ou se produit, est précisément ce qui constitue pour cette chose sa beauté et sa perfection.
Que si quelqu'un était porté à mépriser comme au-dessous de lui l'étude des autres animaux, qu'il sache que ce serait aussi se mépriser soi-même; car ce n'est pas sans la plus grande répugnance qu'on parvient à connaître l'organisation de l'homme, sang, chairs, os, veines et tant d'autres parties du genre de celles-là.


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